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Editorial

Faisons les choses dans le désordre, plutôt que de ne pas les faire

lundi 28 janvier 2013 | Patrick A.

Le proverbe dit « Il ne faut pas mettre les charrues avant les boeufs ». Voilà pourquoi, et au moins depuis 2010, j’avais régulièrement écrit dans ces colonnes que la meilleure sortie de crise passait par l’élection d’une assemblée constituante.

La logique sous-jacente à cette proposition était d’attaquer à sa racine le mal qui est à l’origine des crises cycliques malgaches : la concentration des pouvoirs entre les mains d’un Président que ses courtisans n’ont ni le courage de contrarier, ni intérêt à le faire. Si elle était élue avant le futur Président, une assemblée constituante aurait l’avantage de n’avoir à rendre des comptes qu’à ses électeurs et non pas à l’individu ayant dissous l’assemblée précédente. Elle gagnerait ainsi une légitimité pour remettre à plat l’organisation politique du pays, sans être obnubilée par les petits calculs politiciens qui gouvernent en temps ordinaires la classe politique malgache (qui n’a effectivement de classe que le nom).

Dans ces conditions, le fait qu’Andry Rajoelina ait émis l’idée de tenir les élections législatives avant les présidentielles aurait pu être considéré comme un développement intéressant. Il me semble plutôt que c’est une catastrophe. Andry Rajoelina a malheureusement le génie de transformer l’or en plomb, ne serait-ce que parce qu’il suffit qu’il dise une chose pour que beaucoup de monde dise le contraire. Et pour ce qui est de l’absence de petits calculs politiciens inspirés par des courtisans, il constitue assurément un énorme contre-exemple.

Pour changer la séquence des élections, il faudrait une quasi-unanimité des parties prenantes ; autant dire que cela relève de la gageure. Déjà délicate à tenir pour des élections présidentielles, la date du 8 mai 2013 serait assurément repoussée. Et à attendre une nouvelle fois, ce serait l’électorat qui risquerait de se lasser définitivement, s’il ne l’est pas déjà. Dans le contexte socio-économique actuel, le temps est un luxe que les Malgaches, et plus particulièrement les couches les plus vulnérables de la population, ne peuvent plus s’offrir.

Nous autres Malgaches avont des rapports compliqués avec le temps. À force de vouloir faire du consensuel, de l’inclusif et du « manara-penitra », nous en arrivons à oublier parfois les urgences. Celle du moment est de démontrer que nous sommes de temps en temps capables de tenir des échéances. Pourquoi pas celles du 8 mai et du 3 juillet ?

D’ailleurs, différer les élections de quelques mois permettrait-il de résoudre en profondeur la crise ? On n’en a aucune assurance, car cette crise a largement eu le temps de s’enkyster en quatre ans. Tant qu’à faire, mieux vaut sans doute avoir un Président élu conscient que la crise n’est pas complètement terminée, qu’une classe dirigeante se berçant de l’illusion qu’une conférence nationale de quelques jours aura suffi à rétablir le fihavanana.

Lorsque le passage est devenu trop étroit, le paysan n’a parfois d’autre choix que de faire passer la charrue avant les boeufs.

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