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Opinion

Robert B Zoellick livre ses impressions et sa vision pour le continent Africain

jeudi 3 septembre 2009

Robert B Zoellick est Président du Groupe de la Banque mondiale. Il vient d’achever le mois d’août dernier, sa tournée en Afrique, il livre ci-dessous ses impressions et sa vision pour ce continent.

Une opportunité pour l’Afrique ?

La région des Grands Lacs d’Afrique illustre les enjeux du continent. Je m’y suis rendu récemment pour observer les effets de la crise économique, la situation des pays sortant d’un conflit et l’intégration régionale. En République Démocratique du Congo (RDC), mes pas ont croisé ceux de la Secrétaire d’État américaine, Mme Hillary Clinton. Nous devons maintenant transformer nos impressions en actions.

L’Afrique a été blessée par la crise financière, mais les Africains envisagent l’avenir avec constance : ils veulent promouvoir les ressources énergétiques, les infrastructures, le développement agricole et l’intégration régionale en connexion avec les marchés et les échanges commerciaux mondiaux, ainsi qu’un secteur privé dynamique. Cette liste autre pu être déjà mentionnée en Europe il y a 60 ans, lorsque le continent s’efforçait de se reconstruire et de se développer. En ce qui concerne les États sortant d’un conflit, le défi consiste à « sécuriser le développement » — grâce aux effets conjugués de la paix, de l’ordre, d’une saine gestion des affaires publiques, de l’activité économique et de la légitimité.

En République Démocratique du Congo, au Rwanda et en Ouganda seulement 6 à 10 % de la population dispose de l’électricité. L’électrification rurale, telle que l’ont connue certaines régions des États-Unis dans les années 30 et du Vietnam dans les années 90, transformerait la vie et les moyens d’existence de centaines de millions d’Africains, notamment les femmes. L’Afrique a des moyens : en RDC et en Ouganda, la réalisation de projets hydroélectriques pourrait multiplier par quinze la production d’énergie à faible teneur en carbone et alimenter les réseaux d’électricité d’Afrique australe et d’Afrique de l’Est.

Étant donné qu’environ 80 % de la population de ces pays vivent de la terre, le développement agricole est fondamental. En Ouganda, j’ai visité des installations de culture et de traitement du riz — construites par des Indiens qui avaient fui le régime d’Idi Amin Dada — dans lesquelles sont transformés environ 15 % de la production de riz nationale, dont le tiers provient de petits planteurs de la région. Le Rwanda s’efforce de développer la chaîne de valeur de l’agriculture dans sa totalité : régime foncier, semences, engrais, infrastructure, stockage, transport et financement.

Il est essentiel de tracer de nouvelles routes, de développer le transport fluvial et de construire de nouvelles voies ferrées pour renforcer la cohésion nationale et l’intégration régionale, ainsi que pour faciliter l’accès à la mer des pays enclavés. Il faut compléter ces efforts d’équipement par des activités de soutien, telles que les services d’entretien, la tarification, la gestion financière et la mise en place d’une administration saine. Par le passé, il fallait deux jours aux transporteurs routiers pour franchir la frontière entre le Kenya et l’Ouganda. Aujourd’hui, grâce à la création d’un poste frontalier à guichet unique, les transferts ne prennent pas plus de deux heures. Les fonctionnaires qui utilisaient naguère leur modeste pouvoir pour retarder les véhicules sont maintenant fiers de faire circuler le fret plus rapidement et en plus grande quantité.

Les destructions humaines et matériels causées par les conflits en cours ont été évoquées à l’occasion de la visite de Mme Clinton dans la ville de Goma, située dans l’est de la République Démocratique du Congo. A une courte distance de Goma, toutefois, de l’autre côté de la frontière, un village rwandais mène une vie paisible et propre. Le Président Kagame du Rwanda a souligné qu’un des problèmes fondamentaux des troupes congolaises — mélange d’armée régulière et de milices — résidait dans le fait que les soldats n’étaient souvent pas payés. Lorsque les Rwandais ont entrepris la reconstruction de leur pays après le génocide, ils ont créé une armée relativement petite (environ 20.000 hommes), qui compte parmi les meilleures forces armées d’Afrique. Les étrangers qui souhaitent mettre un terme aux pillages incontrôlés en RDC n’ont pas besoin d’interventions étrangères : ils doivent rémunérer et entraîner une armée réduite tout en facilitant la démobilisation et la réintégration des soldats qui n’en feront pas partie.

Le rétablissement de la sécurité — et la reconstruction d’un pays — passe par la restauration de la dignité humaine. Au Rwanda, j’ai visité des logements pour anciens combattants handicapés. Les officiers à la retraite qui en sont les administrateurs et les hommes en fauteuil roulant qui y vivent appartenaient jadis à des camps opposés, mais œuvrent tous aujourd’hui pour un seul Rwanda.

Cette année, les États-Unis accueilleront le sommet du G-20 et le Danemark sera l’hôte de la conférence des Nations unies sur le changement climatique. La crise économique et le changement climatique ayant souligné l’importance des pays en développement, l’Afrique doit figurer à l’ordre du jour de ces rencontres.

Le G-20 doit créer une multiplicité de pôles de croissance mondiale comme un des éléments de la « nouvelle normalité » d’une économie internationale jusqu’ici excessivement tributaire du consommateur américain. La croissance peut venir de Chine et d’Inde, mais nous devons regarder plus loin. Au fil du temps, les investissements en Afrique peuvent aussi accroître les sources de demande, y compris pour les biens d’équipement et les services produits par les pays développés. L’IFC (institution du Groupe de la Banque mondiale chargée des opérations avec le secteur privé) a constaté que des fonds souverains et des fonds de pension souhaitent investir à nos côtés en Afrique. Les grands pays en développement — Chine, Inde, Brésil — investissent eux aussi dans l’infrastructure, les ressources, l’agriculture et même l’industrie manufacturière de base de l’Afrique. Le sommet du G-20 devrait encourager cette transformation en faisant en sorte que les pays pauvres obtiennent les financements nécessaires, en appuyant les investissements privés et en ouvrant les marchés aux produits africains. Le sommet pourrait aussi mettre en exécution l’engagement à mobiliser 20 milliards de dollars en faveur de la sécurité alimentaire dans le monde que les participants à la récente réunion du G-8, en Italie, ont pris sous l’impulsion du Président Obama.

Les participants aux négociations de Copenhague sur le changement climatique devraient soutenir le développement de l’énergie hydroélectrique et d’autres énergies propres en Afrique, ainsi que les efforts de reboisement. Les forêts africaines peuvent être les poumons du monde — ou rejeter encore plus de fumée dans l’atmosphère.

La mondialisation doit être viable et profiter à tous. Les réunions au sommet qui auront lieu cet automne devraient faire le lien entre la mondialisation et une opportunité pour l’Afrique.

1 commentaire

Vos commentaires

  • 3 septembre 2009 à 12:01 | georges Rabehevitra (#3099)

    Ah, la mondialisation heureuse, on connaît et on apprécie la théorie. Le problème c’est qu’en économie, il y a des faits et des chiffres, le reste relève de la littérature. Mr Zoellick ayant été un imminent membre de du cabinet Bush, doit être au courant de quelques chiffres. La guerre en Irak, depuis son début en 2003 est évalué approximativement et à la louche aux environs de 3000 milliards de dollars, soit aussi à peu près l’équivalent de la dette américaine. Comparez ce chiffre aux 20 milliards pour la sécurité alimentaire dans le monde.

    Quand Israel a bombardé le Liban, la communauté internationale, y compris les pays riche du golf ont levé en 2 jours 2 milliards de dollars pour la reconstruction des infrastructures.

    A Madagascar, chaque déplacement de n’importe quelle délégation d’experts de la BM coûte environ 10.000$/personne/jour.

    Ma question est pour quels résultats pour l’économie des pays pauvres ?

    Savez-vous que pour avoir préparé le dossier d’appel d’offres de la mise sous concession du terminal à conteneur de Toamasina (TAC), la SFI (branche financière de la BM), s’est octroyée 1,5 millions d’honoraires , pour avoir mis à disposition 3 personnes pendant 3 mois !!!. Demandez à la Socíeté philippines concessionaire, vous verrez que je connais bien le dossier.

    Alors le discours de Mr Zoellick est formidable, la pratique de la Banque Mondiale en est une autre. Depuis la réunion de Bretton Wooods en 1944, date de création de cette institution, peut-on faire le bilan de la lutte contre la pauvreté dans le monde et la mondialisation de l’économie ?

    Il faudrait un bon coup de balai dans la manière dont la BM fonctionne avant de donnes des leçons d’économie à tout va. Mais se remettre en cause pour des experts, est-ce possible ?

    Bien à vous et bien le bonjour à Georges BUSH et merci pour son leg en termes de guerre, de finances et d’économie

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