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Tribune libre

Contre les égoïsmes, promouvoir le Verbe et le Geste de la Paix

mardi 7 avril 2009

Une crise est à peine terminée qu’une autre s’est ouverte. A l’heure où tout le monde se réclame du « Vahoaka » pour asséner sa vérité et l’imposer aux autres par la force, le mépris, la tromperie et le mensonge, il me semble encore plus urgent pour toutes les parties concernées de prendre des décisions courageuses en écartant tous les extrêmes et en faisant taire tous les égoïsmes pour arriver à un consensus, devant amener à une paix pérenne.

La rénovation démocratique que l’ensemble du corps social appelle de ses vœux ne demandera pas moins que cela.

Quand les appels à l’inclusion de toutes les tendances dans le processus de résolution de crise ne se font plus entendre et que seuls les revanchards de tous bords, les toupies politiques de tous bords et ceux qui nourrissent leur notoriété sur les mouvements de contestation donnent de la voix, alors c’est l’ensemble des artisans de la Paix qui perdent. Et ce, quelque soient leurs opinions.

Chacun peut concevoir que l’exercice politique est un exercice difficile et délicat mais c’est de là qu’il tire toute sa noblesse. Il impose force morale et courage dans l’action mais surtout discernement et équilibre des positions. Surtout il commande d’avoir un socle de convictions et de valeurs à partager et à faire accepter à toutes les composantes de la société. Il en découle que gouverner c’est avant tout aller au-delà des habits du pouvoir et de ses habitudes de courtisanerie pour donner un cap, mais toujours avec l’humilité, la sagesse et la clarté nécessaires à rassurer, même les plus adversaires les plus radicaux, de la volonté d’être fidèle à ses engagements premiers.

Et le premier des engagements pris au plus haut de la lutte a été d’affirmer qu’à l’issue de cette transition, celui-là même qui la porte ne se présentera pas à la magistrature suprême, et ce, quelque soient les circonstances. Le respect de cette promesse peut être le signe manifeste d’une réelle grandeur tout comme son non respect ne pourra que conduire à une nouvelle désillusion sur la classe politique entière.

Nous avions aussi suggéré que les premiers gestes des autorités de la Transition devaient se faire envers les partisans de Marc Ravalomanana. Car la justice des vainqueurs ne peut être que le lit de futures acrimonies.

Il est en effet illusoire de penser qu’une sortie de crise est possible en piétinant à tout va la charge symbolique et émotionnelle qui entoure, à juste titre, un ancien Président de la République. Il est de même évident que Marc Ravalomanana doit montrer qu’il reconnaît la marche de l’Histoire en ne voulant pas – à quel prix ? – reprendre par la force des attributs d’arbitre suprême et impartial qu’il a au mieux trahis par ces pratiques de gouvernance et de pouvoir, aujourd’hui connus du grand public (national et international) et indignes d’un Chef d’Etat ayant juré d’être entièrement au service de ces concitoyens.

Il faut rappeler, même si cela doit faire crier les orthodoxes les plus durs, qu’en vertu de la Constitution Malgache, les motifs de mise en accusations avérés de Marc Ravalomanana sont légions (et extrêmement graves) mais que le fonctionnement même des institutions absolvent de facto Marc Ravalomanana du fait d’un parlement qui ne joue pas son rôle de contrôle et prête allégeance à l’Exécutif et d’une Haute Cour de Justice qui n’existe pas. Appeler au respect de la « démocratie d’avant le 17 mars », c’est faire abstraction de fait des nombreuses entorses à cette même Constitution (que l’on proclame défendre) et fermer les yeux sur des faits hautement répréhensibles au regard de la Morale mais surtout de la Loi (où pire, les accepter). Il est intellectuellement et moralement condamnable de prétendre défendre la Constitution et la Loi et absoudre, au nom d’une démocratie de façade, ceux qui les ont sans arrêt piétinés et enfreints pendant 7 ans. On ne peut au XXI è siècle appeler à un retour aux jours de « servitude volontaire », où la masse populaire accepterait au nom d’une légalité (elle-même bafouée), d’être mise sous la coupe d’un seul homme, d’un seul clan qui n’aurait de compte à rendre qu’à lui-même. Ne jouons pas sur les mots : ceux qui réclament ce retour en arrière, devraient précisément nous dire par quel mécanisme institutionnel ils prétendaient contrôler et « assagir » Marc Ravalomanana. La réalité est qu’il n’y en a aucun car tout le système reposait sur le bon vouloir d’un seul homme, qui agissait en « roi solitaire » et dont les pratiques ont été largement éprouvées en 7ans.

Néanmoins, Marc Ravalomanana et ses partisans doivent participer activement aux discussions devant tous nous engager. Et toutes les actions (et compromis nécessaire) doivent être engagées dans ce sens. Cette participation est une nécessité de l’Histoire - la Réconciliation Nationale - et doit se faire au même titre que celle de tous les partis politiques, des nombreux exilés et des prisonniers politiques. Mais la tenue des discussions ne doit pas être centrée sur leur participation car il est primordial que tous les acteurs du corps social – et notamment la Société dite Civile - y aient une voix prépondérante. Il est en effet fondamental que la construction des fondations de notre future Démocratie soient dictées par un regard désintéressé sur le champ politique et par l’acceptation d’un socle de valeurs communes conformes à la culture malgache – autour (de la réhabilitation) du Fihavanana – et non par le choc des antagonismes et des intérêts égoïstes. La société civile dans son ensemble, nos (nombreux) intellectuels, nos Ray-amandreny d’où qu’ils viennent, doivent jouer leur rôle de conscience collective, peser sur le cours des discussions et appeler à transcender les différents.

Il ne faut pas se voiler la face : les conditions de légalisation du régime actuel interpellent, et c’est un euphémisme. Aussi est il important de ne pas se taire ou tout accepter sous prétexte d’une lutte populaire prétendument achevée avec le départ de Marc Ravalomanana (qui était souhaitable pour sauver la République) mais d’exiger avec force et insistance autant de responsabilités, de transparence et d’honnêteté (juridique et éthique) qui avaient été exigées – en vain - de leurs prédécesseurs. Il serait incohérent d’accepter aujourd’hui ce que nous refusions hier. Cette lutte sera achevée quand les promesses de Liberté (pour tous) de nos Pères depuis 1947 seront entièrement honorées.

En attendant, il n’est pas acceptable que des personnes, se voulant pourvus d’une autorité qu’ils n’ont pas, réclament au nom d’une démocratie dont ils n’ont qu’une vague idée, que des contestataires, quelles que soient leurs revendications, soient punis. La protection des libertés fondamentales (expression, opinion, création, religion), par ce qu’ils sont les vrais baromètres de la vitalité d’une Démocratie, doivent être nourris en permanence par une action responsable : on ne peut invoquer leur respect en ayant le verbe haut dans l’opposition et les piétiner une fois au pouvoir en ayant le geste petit. Et ne pas oublier que si le Verbe donne du sens, c’est le Geste qui le sublime.

Ce refus d’entendre et d’écouter la voix de l’autre aujourd’hui ne peut que créer la spirale du délitement des espoirs de demain. Entendre, écouter, et prendre les mesures qu’impose le pas de la Paix. Cela doit être le souci principal de ceux qui nous gouvernent.

Certes, des impératifs économiques et sociaux appellent à prendre des mesures d’urgence en faveur des plus fragiles de nos concitoyens mais la tâche qui est devant nous ne doit pas être dictée par le court terme, l’action doit être inscrite dans une vision sur le long terme. Les autorités de la Transition, à leur sommet, doivent ainsi envoyer un message clair à l’ensemble de la population pour expliquer leur démarche, et surtout confirmer que cette nécessité de reconstruire ensemble le Pays de nos pères et de nos enfants, dicte de mettre de côté tous les ressentiments personnels. La promesse d’ouverture de tous aux média publics pourrait par exemple être l’occasion pour toutes les parties de porter la contestation, de la rue à la télévision et/où à la radio à travers des débats sereins pour que l’ensemble des populations puisse juger en toute équité de la maturité de nos hommes et femmes politiques.

Mais nous devons aller plus loin pour mettre définitivement de côté toutes les rancœurs, mettre fin aux populismes et ostracismes de toute sorte et porter le nom de la Liberté et de l’Union au sommet de l’Histoire : il faut mettre tous les acteurs de cette crise, mais aussi des crises passées devant leur responsabilité, devant leur concitoyens, devant nos Pères et nos enfants.

A ce stade, nous devons espérer la réalisation d’une tribune publique où Albert Zafy, Didier Ratsiraka, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, se tiendraient la main devant le Peuple Malgache et ses représentants moraux et appelleraient ensemble à guérir cette Nation, à panser les plaies, à être fidèle à nos valeurs d’entraide et de respect mutuel dans la diversité et à réclamer au nom de notre Histoire l’ouverture d’une nouvelle ère de Liberté.

En seront-ils capables ?

Ne serait-ce pas la preuve ultime que le Pardon est possible et que en définitive, à Madagascar plus qu’ailleurs, le Fihavanana est plus fort que la somme de nos individualités et de nos égoïsmes ?

Hyacinthe Befeno Todimanana, le 31 mars 2009

1 commentaire

Vos commentaires

  • 7 avril 2009 à 19:54 | ASSISE (#1505)

    Mba nisy nijery sy namaky ihany ve ity lahateny ity ?

    "A ce stade, nous devons espérer la réalisation d’une tribune publique où Albert Zafy, Didier Ratsiraka, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, se tiendraient la main devant le Peuple Malgache et ses représentants moraux et appelleraient ensemble à guérir cette Nation, à panser les plaies, à être fidèle à nos valeurs d’entraide et de respect mutuel dans la diversité et à réclamer au nom de notre Histoire l’ouverture d’une nouvelle ère de Liberté.

    En seront-ils capables ?
    Ne serait-ce pas la preuve ultime que le Pardon est possible et que en définitive, à Madagascar plus qu’ailleurs, le Fihavanana est plus fort que la somme de nos individualités et de nos égoïsmes ?"

    Io amphany io fotsiny dia midika zavatra be dia be.

    Samy mbola velon’aina ireo olona voalaza anarana ireo, ny tantara no hitsara, ny tantara anefa dia mbola mitohy.

    Tsy hanenenana ny manantanteraka an’io, saingy ny tanjona sy ny ambo-po no mibaiko.

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