Facebook Twitter Google+ Les dernières actualités
jeudi 25 avril 2024
Antananarivo | 02h17
 

Tribune libre

Communiqué

mardi 24 novembre 2009

SEHATRA FANARAHA-MASO NY FIAINAM-PIRENENA
SeFaFi
Observatoire de la Vie Publique
Rue Rajakoba Augustin Ankadivato Antananarivo
Tél. : 22 663 99 Fax : 22 663 59 Email : sefafimd@gmail..com


LA TRANSITION : RAPPEL DES VRAIS OBJECTIFS

Après la difficile mise au point des accords de Maputo et d’Addis-Abeba, et leur application plus hésitante encore par ceux qui pourtant les ont signés, le moment est venu de concrétiser les objectifs que s’était donné le régime de transition pour justifier sa prise de pouvoir aux yeux de la nation et de la communauté internationale. Face aux dérives actuelles de la politique politicienne, il est indispensable de rappeler quelques-unes des priorités à mettre en œuvre d’urgence.

Amnistie et prisonniers politiques

Le SeFaFi en avait traité dès le mois d’avril, pour signifier son refus de l’oubli collectif : « Apurer les comptes du passé constitue une tâche prioritaire pour la Transition engagée par Andry Rajoelina. Non par esprit de vengeance, mais par souci de justice. En effet, une véritable réconciliation ne peut intervenir que lorsque justice a été faite : tel est l’esprit des Commissions ‘‘Vérité et Réconciliation’’ instituées, sur le modèle sud-africain de Mgr Desmond Tutu, dans de nombreux pays. En d’autres termes, les délits doivent d’abord être identifiés, reconnus et sanctionnés par le tribunal, avant d’être éventuellement graciés ou amnistiés. Et cette démarche s’applique à toutes les demandes d’amnistie, qu’elles émanent de l’intérieur ou de l’extérieur du territoire national » [1].

Décréter une amnistie avant que les faits ne soient jugés revient à prôner l’impunité, notamment pour les crimes de sang et les détournements de biens publics. C’est pourtant ce que préconisent les accords de Maputo, avec l’aval de la communauté internationale, pour la période comprise entre le 1er janvier 2002 et le 6 août 2009. Pareil dispositif revient à consacrer l’impunité des dirigeants pour leurs infractions et exactions, et à perpétuer le cycle des mouvements de contestations populaire visant à renverser le pouvoir.

Dans ces conditions, que devient le Conseil National de Réconciliation ? Son rôle est de qualifier les faits incriminés, ce qui doit constituer un préalable à toute loi d’amnistie. Par définition, l’amnistie fait référence à l’« oubli » des crimes et délits qui en temps normal entraînent une sanction. Seul l’oubli précédé du pardon amène à la réconciliation, d’où la nécessité du processus « Vérité – Réconciliation », qui vise à mettre à nu les exactions perpétrées afin que leurs auteurs avouent et se repentissent devant les victimes. Il est donc heureux que le président du Conseil National de la Réconciliation ne soit pas impliqué dans de tels faits. Cela lui permettra d’exiger et d’obtenir que la loi d’amnistie se limite aux seuls faits dûment constatés et définis par ce Conseil. Faute de quoi, la porte sera ouverte à l’arbitraire et aux auto-justifications.

Il en va de même des prisonniers politiques. Etre condamné pour avoir commis une infraction politique ne donne absolument pas le droit d’être libéré. Cependant, cette clause figure dans l’Accord n° 2 de Maputo, ce qui peut conduire à libérer des criminels, à l’encontre des principes juridiques et des valeurs de justice. En l’occurrence, la politique prend le pas sur la loi. Tout en le réprouvant, le SeFaFi, comme tous les citoyens, doivent en prendre acte. Mais cette logique aboutit à une justice à deux vitesses : celle des politiques qui s’amnistient eux-mêmes, et celle des citoyens qui subissent le poids de la loi…

La tâche assignée au Conseil National de la Réconciliation s’avère donc délicate et difficile mais elle est essentielle car elle contribue aussi à la moralisation du monde politique..

Le recours à l’amnistie ne doit surtout pas devenir une habitude après chaque changement de dirigeants politiques. Elle risque cependant de le devenir tant que l’appareil judiciaire sera utilisé comme une arme entre les mains des dirigeants.

Quel Conseil Economique et Social ?

Une autre préoccupation concerne la composition du Conseil Economique et Social. Organe consultatif, ce Conseil devrait avoir pour mission de conseiller les pouvoirs publics et de participer à l’élaboration de la politique économique et sociale ; favoriser à travers sa composition le dialogue entre les différentes catégories professionnelles ; contribuer à l’information des citoyens. De ce fait ses membres devraient être des représentants de la société civile, des organisations professionnelles, des différents secteurs de production ainsi que des personnalités qualifiées dans les domaines social, économique, culturel, scientifique.

L’Acte additionnel d’Addis Abeba stipulant que le Conseil Economique et Social est composé de 10 personnes désignées par chacune des 4 mouvances et de 32 représentants de la société civile et du secteur privé, le SeFaFi estime qu’une telle composition risque de dénaturer le Conseil Economique Social. L’Alliance des Organisations de la Société Civile adhérant aux Accords de Maputo, le GESCI (Groupement des Entités de la Société Civile pour la Défense de la Démocratie et des Valeurs Républicaines) et le CONECS se sont entendus pour organiser une Assemblée Générale de l’ensemble de la Société Civile.

Une démarche est en cours pour rédiger les termes de référence de ce Conseil Economique et Social, à adopter en Assemblée Générale, puis au Conseil des Ministres. Les entités ou secteurs désigneront ensuite leurs représentants selon des règles et un processus transparent, et les nominations officialisées par un texte.

Les échéances électorales

Les élections sont l’objectif majeur de la Transition. Les déboires du passé montrent à l’évidence que l’ensemble du processus électoral doit être organisé, et pas seulement supervisé, par une Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), le ministère de l’Intérieur en assurant la logistique. Ce dernier s’est engagé à fournir une carte d’identité biométrique à tous les citoyens dans les six mois, soit à la mi-mai : une échéance acceptable puisque le référendum constitutionnel, la première des élections à tenir, ne saurait être tenue avant la fin de la saison des pluies. Pendant ce temps, la liste électorale pourra être mise à jour en début d’année, selon le calendrier habituel, avec recensement si besoin était, et affichage des listes un mois avant chaque scrutin.

Parallèlement, un nouveau Code électoral précisera la composition, la structure et les pouvoirs de la CENI : une tâche capitale, qui conditionnera la sincérité des élections futures, en les soustrayant à toute influence du pouvoir en place et des partis politiques. Il conviendra enfin d’élaborer une loi rigoureuse qui impose la transparence dans le financement des campagnes électorales.

Par le référendum constitutionnel, le pays se dotera ensuite d’une loi fondamentale qui devra répondre aux questions essentielles telles que la forme de l’Etat (unitaire ou autre), sa nature (présidentielle, semi-présidentielle ou parlementaire) et son organisation territoriale (fédérale ou décentralisée) ; la manière d’assurer la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la justice ; les conditions d’éligibilité (âges minimal et maximal, intégrité personnelle, compétence professionnelle, etc.). Il conviendra également de mettre un terme définitif aux modifications de la Constitution pour convenance personnelle, en interdisant les révisions par voie parlementaire et en soumettant toute révision à l’approbation des trois quarts des suffrages exprimés.

Pour une éthique politique enfin mise en pratique

Dans le cadre des accords de Maputo et d’Addis-Abeba, la nomination de personnalités au passé douteux, voire même en délicatesse avec la justice, a provoqué un véritable traumatisme dans l’opinion publique. Comment le simple citoyen peut-il accepter que des postes de très haute responsabilité, allant jusqu’à représenter le pays à l’étranger, soient confiés à des hommes et des femmes indignes ? La classe politique, toutes tendances confondues, ne cesse de donner le spectacle lamentable d’ambitieux et d’affairistes préoccupés de leurs seuls privilèges et indifférents au sort de leurs concitoyens.

Les droits de l’homme sont officiellement partie intégrante de notre droit positif. Mais où sont l’intégrité personnelle et le véritable respect de ces droits ? En réalité, les hommes politiques se moquent bien de toutes ces conventions ratifiées, dont les exigences ne sont jamais prises en compte par les tribunaux. Il en va de même pour les principes éthiques : tout le monde en parle, personne ne les met en pratique. Tant que perdurera cette dichotomie, qui n’est qu’hypocrisie, il y a peu de chances que la classe politique se renouvelle jamais, et qu’émerge une génération de dirigeants intègres, compétents et dévoués à leur peuple. Le grand enjeu de la Transition, c’est aussi et surtout celui-là.

Antananarivo, le 23 novembre 2009

Notes

[1Voir notre communiqué du 19 avril 2009 : « Réussir la transition ».

6 commentaires

Vos commentaires

  • 24 novembre 2009 à 08:51 | Bena (#2721)

    niveau d’analyse tellement élevé que le peuple malgache ne suit plus !!!

    c’est en suivant vos contradictions que ratsy-rahonana et tgvendrana ont ouvert grand le portail de tsiafahy pour sortir les plus grands criminels de ce pays, dont coutiti (sang), fidy (mutinerie) et gariste (deniers publics).

    le comité vérité-reconciliation doit procéder aux enquêtes lui-même, comme un tribunal. ensuite il procède à l’amnistie quand la vérité est établie sur un cas précis.

    vous êtes tellement fort, mesdames et messieurs de sefafi au point de noyer les poissons.

  • 24 novembre 2009 à 09:18 | RAKOTOZANANY (#3245)

    SEFAFI n’est qu’une de ces représentants français, fouteurs de M...E dans ce pays.
    AH Dieu est grand.. !? c’est très facile de se dire homme de Dieu et se cacher derrière pour satisfaire ses besognes.
    On finira , je vous dis, plus bas que HAÏTI, vous verrez, ( esclaves jusqu’au bout des temps)
    Bien sûr les verreux du pays en profitent bien , C.NS comme ils sont, ils ne vont pas rater l’occasion.
    Mais pourquoi, bon sang ! qu’as-t-on fait à ce fameux Bon Dieu, pour être complexés et narcissiques, nuls.... ???
    Vous avez la réponse.
    AMEN

  • 24 novembre 2009 à 12:59 | Raol (#529)

    Mille mercis pour l’audace et l’objectivité du SeFaFi. Il n’est pas étonnant d’entendre et de voir des critiques à l’endroit du SeFaFi parce que la vérité blesse, surtout pour ces fanatiques. Actuellement, il est difficile voire impossible pour des gens censés dire la vérité à haute voix de s’exprimer. Où sont passé les Chefs d’Eglise, notamment celui du FJKM ? On se demande si la religion est devenue une arme de guerre de la politique. Et actuellement, avec la tornure des choses, des hommes et des femmes apparemment intellectuels sombrent dans l’ignorance de la vérité. Oh, je dis plutôt qu’ils manifestent une haute teneur de mauvaise foi qu’ils osent détourner la vérité. Alors, est-ce qu’on va vers l’impunité des dirigeants alors qu’ils ont commis des crimes ? Il faut bien méditer sur ce qui se passe aujourd’hui, parce que tôt ou tard, cela va provoquer encore et encore des bombes à retardement. Il faut que justice soit faite et après s’il le faut de l’amnistie. Mais, c’est un choix ... ou plutôt un forcing de la part de ceux qui détiennent de l’argent (je dis et redis, la communauté internationale nous a forcé à faire des choses impensables et irréalisables). Alors, prions, priez et prennez garde parce que la vérité finit toujours par triompher.

  • 24 novembre 2009 à 18:03 | Zafimaro (#3479)

    SEFAFI :

    Ambony lotra francais nao, ka tsy takatra ny mpiteny Malagasy.

    Ambany lotra ny fahamarinana sy sincerity nao, ka tsy ilainy ny olona afaka misaina malalaka.

    Hano sy lero ny fahana omeny reny-malalanao, fa aza mandrebireby ny olona sahirana.

    Any amy salon ny ambasady ny reny-malalanao entina io resaka io, sy any amy tranobe n’i rajohelina sy ny hasina, sy any amy fiangonany ny olona toa an’i ahiatolahy OMAR.

  • 24 novembre 2009 à 20:47 | Manantena (#1345)

    Je ne suis plus ce SEFAFI. J’avais cru qu’il était signataire au Carlton pour l’application de Maputo.
    Je ne comprends rien ou alors il remet en cause une partie qu’il n’admet pas avec les putschistes : le retour au pays de Ravalomanana, d’où cette remise en cause de l’amnistie ??? POURQUOI cette peur de voir le seul qui a toute la légalité dans ces mouvances ???
    Tahotra ny rambony ???

  • 24 novembre 2009 à 22:24 | FIPOZ (#2162)

    Alléluia pour cet article ! Totalement d’accord avec le principe de la non-impunité. C’est trop facile de s’affranchir de tous les crimes, exactions, détournements des finances publiques et autres, en se prétendant vouloir apporter les solutions de sortie alors que ce sont les mêmes qui ont conduit le pays dans ce trou depuis 35 ans !

    Pour démarrer sur de nouvelles bases, il y a d’abord lieu de tout assainir sinon le siphon creusera encore de plus belle. Comment peut-on accorder du crédit à ces hommes dont le passif lourd a pénalisé le pays de tout progrès socio-économique. Que de nouvelles têtes se lèvent pour conduire cette nation car si on laisse toujours les mêmes, ils recommenceront leurs scénarios. La génération future en paiera le prix.... Il faut y penser.

Publicité




Newsletter

[ Flux RSS ]

Suivez-nous

Madagascar-Tribune sur FACEBOOK  Madagascar-Tribune sur TWITTER  Madagascar-Tribune sur GOOGLE +  Madagascar-Tribune RSS