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Tribune libre

Cinquantième année de l’Indépendance : fête ou pas fête ?

mardi 16 mars 2010

Madagascar, à l’instar de 13 autres ex-colonies françaises, devrait fêter cette année le 50éme anniversaire de son indépendance. Ce n’est pas un anniversaire ordinaire, c’est un jubilé que l’on devrait « célébrer avec faste ».
Mais le cœur n’y est pas !!!
Après trois Républiques et différents régimes (socialisme libéral, directoire militaire, socialisme démocratique, capitalisme libéral et actuellement militaro-civil), le bilan est sombre, désespérant.

Ces changements successifs, basés sur des aspirations légitimes de la population, n’ont fait qu’enfoncer de plus en plus la majorité des malagasy dans la pauvreté et la frustration.
La Nation « libérée » traverse au bout de cinquante années d’errance et de turpitudes une crise politique aigüe, aux conséquences économiques et sociales dévastatrices.
Nous constatons un appauvrissement dramatique de la population, un délitement de l’état de droit et une lutte acharnée de la classe politique pour le pouvoir, au détriment de l’Intérêt Supérieur de la Nation et sur fond d’emballement de la corruption.
Le sens du DEVOIR est ignoré, la plupart des politiciens ne pensent et n’agissent que pour le POUVOIR.
Ces assoiffés de pouvoir qui ne cessent de berner les citoyens en se réclamant des chantres de la DEMOCRATIE, ne sont en réalité que des champions de la KLEPTOCRATIE.

La Souveraineté nationale est mise à mal en se faisant jeter comme des malpropres en séance plénière des Nations Unies ou à Bruxelles et même auprès de l’Union Africaine.
La Souveraineté nationale est mise à mal, quand les malagasys incapables de discuter entre eux comme des personnes adultes doivent recourir à l’intervention d’organismes internationaux.
La Souveraineté nationale est mise à mal, quand malgré les énormes potentiels de richesse, le pays continue à vivre sous tutelle des bailleurs de fonds.
La Souveraineté nationale ne signifie plus grand-chose dans un état de délabrement économique, d’insécurité alimentaire chronique, de disparition de valeurs culturelles identitaires (Soatoavina), de dévaluation monétaire hallucinante, etc.
Hélas, la Souveraineté nationale est dévoyée par des politiciens qui l’utilisent comme outil pour « légitimer » un pouvoir mal acquis en attisant cyniquement un certain chauvinisme. Ils défient le monde de s’ingérer dans la résolution de la crise alors que jusqu’à maintenant ils n’ont pu que démontrer leur incompétence à se comporter comme des adultes responsables, capables de trouver une solution malgacho-malagasy.
D’ailleurs comment cela serait-il possible tant qu’on perpétue le « diviser pour régner » du pouvoir colonial ?

Combien y-a-t-il de partis politiques à Madagascar, combien y-a-t-il d’associations cultuelles, combien y-a-il d’obédiences plus ou moins obscures ?
Nous constatons une multiplication d’entités qui luttent pour des conflits d’intérêts au mépris de l’Intérêt Supérieur de la Nation.
Ce délitement de la société malagasy profite, en premier lieu, aux sociétés multinationales qui ne cessent de rogner notre Souveraineté nationale pour sécuriser leur accès à nos richesses minières et agraires : « Tantely afa-drakotra ! »

Après cinquante années d’indépendance « ratée », il est temps de se questionner sur l’articulation des problématiques de la souveraineté, des ressources et de la politique.

La Souveraineté est le point crucial.
Il est à rappeler que la sauvegarde de la Souveraineté nationale incombe à chaque citoyen. Chaque citoyen conscient de ses droits et responsable devant ses devoirs.
Le pouvoir colonial bafouait les droits du peuple colonisé : travaux forcés, SMOTIG (service de la main d’œuvre pour les travaux d’intérêt général), emprisonnement des opposants nationalistes, etc. Les seuls devoirs des malagasy étaient de chanter les louanges de Renimalala pour ses œuvres de civilisation des indigènes. Le système colonial reposait sur l’infantilisation des colonisés. La référence étant la civilisation occidentale, les colonisateurs s’ingéniaient à gommer nos cultures identitaires, à nous pousser à intégrer leurs valeurs, à les copier. Stratégie payante : une copie ne vaudra jamais l’original.
Nous ne serons jamais « intimement » français et resterons toujours dépendants de nos maîtres tant que nous ne prenons pas conscience de ce dévoiement.

Après le modèle français, nos leaders politiques ont tenté les modèles socialistes coréens et soviétiques. D’autres leaders ont tenté le modèle anglo-saxon (europe du nord, américain). Actuellement, pour sortir de la crise, les dirigeants se précipitent vers le Guide libyen (auto-proclamé roi des africains) et vers l’ancienne puissance colonisatrice pour demander aides et conseils.
Bien que les films Madagascar 1 et 2 montrent surtout des lémuriens, il n’y a pas que des singes dans notre pays, il y a les malagasys !
Quand arrêterons-nous de singer les autres ? quand arrêterons-nous de nous comporter comme des enfants ? quand finirons-nous par admettre qu’il n’y a pas que la civilisation et la culture occidentale mais qu’il y en a plein d’autres de part le monde, qu’aucune civilisation n’est parfaite mais que les grands pays ont d’abord su défendre et même imposer la leur ?
Quand prendrons-nous conscience que les valeurs culturelles identitaires constituent le socle de la Souveraineté nationale ?

Heureusement que, même après le gommage des colonisateurs et après l’usage abusif (vidés de leur sens) de nos dirigeants successifs, les notions de FIRAISANKINA et de FIHAVANANA sont encore ancrés dans notre subconscient, sont encore dans nos gênes. Sans cela, et à cause des errances de nos politiciens, Madagascar aura déjà connu un génocide.

Alors, en cette année de jubilé, il est du droit et du devoir de tout citoyen malagasy de REFONDER NOTRE NATION.
Dans un contexte de forte demande en matières premières et énergétiques, nos richesses naturelles suscitent les convoitises des sociétés transnationales et des puissances émergentes. Nous avons un potentiel énorme pour assurer notre développement et de prétendre devenir dans les prochaines années un pays émergent, le « Dragon » de l’Océan indien.
Mais focalisons-nous d’abord sur notre principale richesse, les SOATOAVINA malagasy.
Réapproprions le Fanahy maha-olona et le Hasina. Réapprenons le Fifampitokisana, le Fifanajana et le Fifandeferana.
Fondons notre Souveraineté nationale sur nos identités culturelles que sont le FIRAISANKINA et le FIHAVANANA.
Appliquons-les dans notre vie quotidienne, au sein de notre famille, de notre fokontany ainsi que dans notre monde de travail, et pourquoi pas dans les forums de discussions ?

Les prédateurs connaissent bien notre proverbe « izay misaraka fasika fa izay mitambatra vato ». Utilisons-le à bon escient.
Remettons au goût du jour le « aleo very tsikalakalam-bola toy izay very tsikalakalam-pihavanana ».
Avis aux amateurs en politique, arrêtez de diviser les malagasy et de nuire à la Souveraineté nationale en vous luttant pour le pouvoir. Arrêtez de vous prostituer auprès de puissances étrangères. Au contraire, les citoyens malagasy exigent de vous un sens aigu du DEVOIR. À commencer par le devoir d’exemplarité, soyez des modèles du Fifampitokisana, du Fifanajana et du Fifandeferana. Rappelez-vous, constamment, que « personne ne détient la vérité », qu’une mouvance n’est pas le peuple mais que « olon’iray tsy mba vahoaka » et « hevitry ny maro mahataka-davitra ».

Aux citoyens malagasy, refondons notre Souveraineté nationale, construisons le « Modèle malagasy » aussi bien dans le domaine économique que social. Nous avons les richesses naturelles, mais il est prouvé aussi que nous avons des intelligences et des compétences qui ne demandent qu’à se révéler et à s’épanouir.
Ce qui nous manquait, ou que l’on nous faisait ignorer c’est l’esprit maha-malagasy. Soyons fiers de nos valeurs et cultivons-les. Elles constituent le socle de notre cohésion.
En cette année 2010, que tous les malagasy conscients de leurs droits et de leurs devoirs de citoyens, se concertent et s’unissent pour REFONDER NOTRE NATION.

Ainsi, et seulement ainsi, nous avons le devoir de « célébrer » le Jubilé du 50ème année d’Indépendance. Et avec « faste » s’il vous plaît !

José Ramaromanana

6 commentaires

Vos commentaires

  • 16 mars 2010 à 18:01 | Rakotoasitera Fidy (#2760)

    Monsieur José Ramaromanana

    Vous venez de repeter ce que d’autres avant vous ne cessent de réclamer

    Quand je dis d’autres ....

    Voyez vous monsieur , votre discours ressemble aux appels lancés par
    Le PEN ici en France depuis trente ans

    Car dites moi qui dira non aux propos que vous énoncez !!!!!

    • 16 mars 2010 à 21:02 | ramanankasina (#3023) répond à Rakotoasitera Fidy

      Monsieur Rakotoasitera Fidy,

      Effectivement, Monsieur Ramaromanana n’a rien inventé. Cependant, dans le contexte actuel, il est nécessaire de ramener les discussions sur le fond au lieu de s’invectiver stérilement entre sympathisants des différentes mouvances.
      « Quand je dis d’autres ... » avez-vous écrit : je vous rappelle que le thème de la Souveraineté nationale n’est pas le monopole de Le PEN, tout citoyen digne de ce nom a le devoir, en premier lieu de défendre cette Souveraineté.
      Aux antipodes de Le Pen, le discours de Monsieur Ramaromanana est inclusif quand il parle de Fifampitokisana, de Fifanajana et de Fifandeferana.
      Vous avez le choix des filtres de lecture, libre à vous si vous préférez le filtre « Le Pen » !!!

    • 16 mars 2010 à 21:50 | izamoa (#3975) répond à Rakotoasitera Fidy

      Monsieur Fidy,

      je crois que vous n’avez pas très bien compris le texte de J. Ramoramanana. Ou alors, vous avez totalement zapper ce que veut dire le « soatiavina », de plus vous n’avez pas lu, ou n’avez pu lire le texte en malgache car c’est une langue que vous ne maîtrisez pas, plus ?
      peu importe, il faut savoir lire entre les lignes et votre réaction démontre à quel point vous vous êtes tellement assimilé, « copié-collé » à la culture qui n’est et ne sera jamais la votre, que vous ne pouvez plus comprendre celle de vos ancêtres...
      Moi aussi, je vis en pays françois et maîtrise la si belle langue de Molière, je n’y vis pas dans mon pays natal et c’est la raison pour laquelle, je ne me permettrais jamais de juger ce que ceux qui sont au premier plan ressentent de ce marasme que le peuple malgache est en train de vivre.
      Monsieur José Ramoramanana ne fait que nous proposer à nous Malgaches de retrouver notre dignité ancestrale ! Savez-vous seulement ce que cela veut dire ou êtes vous endormi (mihesona) par l’identité nationale prônée par le ministre de l’identité nationale, de l’immigration (dont vous faîtes partie, soit dit en passant) et de l’intégration. S’intégrer veut-il dire pour vous, oublier, renier votre propre culture ? C’est pour cela, je pense que vous comparez cet appel au secours pour le sauvetage de notre belle île, notre « firenena », notre « soatiavina », pour un appel le Penien.
      Votre propos me choque, il démontre à quel point M. José Ramaromanana a raison, et à quel point vous êtes perdu...Gasy Very ! Very fanahy. Ny fanahy no maha olombelona. Aza adino !

  • 17 mars 2010 à 17:20 | Rakotoasitera Fidy (#2760)

    Par cette ’provocation’ je m’attendais à beaucoup plus de réactions

    Hélas ...

    C’est à se demander si Madagasikara interesse encore les malagasy de l’extérieur

    • 17 mars 2010 à 22:04 | vololona34 (#3976) répond à Rakotoasitera Fidy

      Monsieur Rakotoasitera,
      je suis tout à fait d’accord avec la démarche de Mr Ramaromanana, il nous incite à nous retrouver autour de nos valeurs qui sont louables et en qui nous pouvons être fiers, des valeurs qui nous ont été confisquées. Avant de reconstruire notre pays de ce chaos , il faut d’abord que les malagasy prennent conscience de l’exhortation à la paix entre les malagasy. Mr le Pen est lui même conspué dans son pays c’est dire qu’il n’a aucun programme que « casser » du pauvre immigré corvéable à merci sans papier !!! et s’il parvient au pouvoir il n’aura aucune honte à continuer à « casser » du pauvre immigré, mais encourager les sociétés françaises à venir dévaster votre pays, entre Mr Ramaromanana et le Pen le fossé est abyssale...moi je suis malagasy en France et je suis très très heureuse de ce message, et j’espère de tout coeur que tous les malagasy de France et d’ailleurs soient sensibles petit à petit , ça ne se fera pas du jour au lendemain tant le mal est profond mais c’est une rééducation.

  • 17 mars 2010 à 20:59 | ramanankasina (#3023)

    Un enregistrement audio du texte en malagasy est disponible à l’adresse suivante :

    http://www.esnips.com/doc/41c224e4-4951-404d-9863-d12d42e14671/Antso_avo__Fanarenam-pirenena

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