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Editorial

Un peu de poutine dans notre vary mangatsiaka

mercredi 23 mai 2012 | Patrick A.

Accent québécois

Une question était posée hier par un lecteur, mais l’on pourrait presque croire qu’Andry Rajoelina a jugé nécessaire de nous précéder sur la réponse :

Question de « rasoulou » :

Patrick,

Si je comprends bien : cette stupide loi de 1962 ! est une brèche à toutes dérives de dictatures et de muselage des opposants, comme ce qui s’est passé samedi dernier ! C’est désolant ! et ce sera quand la Liberté ?

Réponse du Président de la Transition hier à Ambohitsorohitra :

Durant les campagnes électorales, les meetings seront libres et point n’est besoin de formuler une demande d’autorisation pendant cette période. Tous les candidats aux élections, tant législatives que présidentielles, sont autorisés à tenir des réunions populaires sur tout le territoire malgache. Mais pour l’heure, je lance un appel à tout un chacun à faire preuve de responsabilité afin que nous puissions redresser et sortir le pays de cette crise.

Quant à ma propre réponse, je puis tenter de la formuler ci-après.

Si d’un point de vue juridique, la réponse d’Andry Rajoelina est conforme aux textes en vigueur [1], il n’en reste pas moins que ces ordonnances soumettant par principe toute réunion publique et toute manifestation sur la voie publique à autorisation préalable apparaissent comme étant en contradiction flagrante de la Constitution et des Conventions internationales que Madagascar a pourtant signées. Une restriction aussi généralisée apportée au droit de réunion est de toute évidence disproportionnée par rapport à des impératifs normaux de sauvegarde de l’ordre public.

Plus grave peut-être, telle quelle, la loi est surtout une loi pousse-au crime. Elle met dans la même zone de flou les porteurs de « rano mahery » pour un « didim-poatra », les vrais syndicalistes et ceux qui auraient éventuellement l’intention de commettre des coups d’État violents. Ainsi, elle fait planer l’opprobre sur toute tentation d’exprimer une revendication légitime et freine toute expression du corps social. Il n’est pas déraisonnable d’estimer que ce texte, en amenant à enfouir les frustrations de la société, joue un rôle très important dans le cycle de crises que connait Madagascar : dans notre pays, le mécontentement ne peut pas s’exprimer ; il ne peut qu’exploser, de préférence sur la place du 13 mai.

Comme il existe quand même des juristes qui ont de l’humour, certains soutiendront peut-être avec moi qu’il n’y a là que stricte application de la Loi. Le texte dit bien : « Ne sont pas, toutefois, soumises à autorisation les sorties sur la voie publique conformes aux usages locaux ». 1972, 1991, 2002, 2009 : on peut bien parler d’usage...

Notre indifférence depuis 50 ans par rapport à ce sujet contraste cruellement avec l’indignation qui est née au Québec à l’occasion de l’adoption de la loi 78. Cette loi exige notamment que les manifestations publiques soient déclarées huit heures à l’avance, ce qui reste pourtant largement plus libéral qu’une exigence d’autorisation préalable et ne diffère pas fondamentalement des pratiques en France. La loi supposée ramenée l’ordre est aujourd’hui en passe de devenir l’objet et la motivation principale de la manifestation.

Oui, ces textes devront être réformés. Mais en attendant, l’on n’aimerait pas être à la place des conseillers municipal d’Antananarivo, qui se retrouvent obligés de statuer en urgence sur une question laissée sous le tapis depuis 50 ans : qu’est ce que le droit de se rassembler pacifiquement ?

P.-S.

Au cas où ... : le poutine auquel le titre du présent article fait référence est le plat québécois.

Notes

[1Ordonnance 60-082 du 13 août 1960 modifiée notamment par l’ordonnance n° 62-017 du 14 août 1962

6 commentaires

Vos commentaires

  • 23 mai 2012 à 09:36 | plus qu’hier et moins que demain (#6149)

    Tout est question de maturité et de responsabilité, aucune loi au monde ne peut régir la vie en société pour les immatures et les irresponsables. « NY HENDRY IHANY NO ANARINA FA RAHA NY ADALA NO ANARINA NY LAMBANY NO ARIANY ». Même, si les us et coutumes et les bonnes mœurs sont sources de droit, vouloir tout écrire en noir sur blanc les règles qui régissent la vie en société relève de l’utopie.

  • 23 mai 2012 à 09:56 | kakilay (#2022)

    Question : une ordonnance est-elle supérieure à la Déclaration des droits de l’Homme que Madagascar a signé, et/ou à la Constitution ?

    Quand on a entendu les « négociateurs » de l’Emmo-reg à Ambohijatovo, ils se réfugiaient derrière la fameuse : firenena tan-dalàna.

    Alors ?
    Sont-ils dans l’ignorance des autres textes ?

    Car il est dit que c’est un droit. Donc, pas besoin de demander une autorisation. La question est de concilier ce droit avec la préservation de l’ordre public : d’où la nécessité d’informer les pouvoirs publics. Pour que ces derniers prennent les mesures pour maîtriser les débordements. La baomba et ses sbires ont pour mission d’encadrer les manifestations et d’agir en cas de débordement et non d’interdire une manifestation. Et nul n’est coupable avant les bombes lacrymogènes quand on regarde les films efa mpandeha.

    On est alors estomaché, quand un pt, du haut de sa petite tribune se met à déclarer, et qui aurait valeur de je ne sais quoi, que les manifestations ne seront autorisées que lors des propagandes électorales.
    Quel texte lui donne ce droit ?
    La « souveraineté nationale », que l’on brandit pour ceux qui n’ont que le hambo-po (personnel donc) comme référence, nous dit-elle que l’on peut piétiner les Droits de l’Homme et La Constitution ?
    État de siège donc avant les propagandes ?
    Et le citoyen ne retrouve tous ses droits que lors des élections ?
    Est-ce raisonnable et souhaitable ?
    A qui profite le crime ?

    Et l’on va dire que c’est la faute à une personne après.
    Que dit la HCC ?
    Que dit la presse qui se donne comme mission noble d’éduquer le citoyen ?
    Que disent les politiciens imbus de leur « amour de la patrie » ?
    Le citoyen-journaliste est-il quitte quant à la dérive despotique que peut faire un pt à l’eau de rose ?

    La liberté d’expression c’est aussi la liberté de critiquer. La presse ne sera jamais un 4ème pouvoir, tant que les journalistes ne seront pas libres dans leur tête. Et il faudra le redire : pourquoi ce silence généralisé quand Ambroise s’est fait tabasser pour s’être exprimé à « fréquence plus » ? Comment se fait-il que ce soit un français qui ait osé demander la dissolution de la FIS ?

    Alors,
    cette liberté d’expression ?
    Elle est acquise ?

    • 23 mai 2012 à 11:43 | alamino (#809) répond à kakilay

      mazava ! io phaty io dia tsy misy légalité sy légimité !

      tsy misy zavatra lazaina untsony momba azy io hafa tsy ny fomba hialany eo amy pouvoir sandoka !

      violente manifestation comme il avait fait !

      ou dissolution par un gouvernement en exil !

      je mise sur la dernière solution car moins coûteuse en vie humaine et plus sûre d’avoir des gens intègres pour une convention nationale digne de ce nom !

      il s’agit ici d’un vrai régime de transition pour laisser aux chefs des partis politiques de bien réfléchir à cette loi de 1962 avant de prétendre gouverner près avoir été élus aux suffrages des malgaches démocratiquement !

  • 23 mai 2012 à 11:31 | alamino (#809)

    La preuve même au Canada la loi matraque fait des remous !!!!!

    A Mada, c’est plus du côté des gouvernants que la loi anti-matraque semble complètement zappée !!!!!!!!!!!!!!!!!!

  • 23 mai 2012 à 15:02 | rasoulou (#4222)

    Merci de m’avoir répondu à ma question,Patrick,mais votre réponse diffère avec celle de Rajoelina, ce dernier prône pour le durcissement, et vous : vous suggérez la réforme qui est loin d’être gagnée, puisque la loi anti-Liberté, si je peux dire, se trouve ancré dans les moeurs et coutumes, elle était là depuis 1962 !!!?

  • 23 mai 2012 à 16:25 | Tanindrazana (#3224)

    Il ne faut pas perdre le temps d’insister sur la liberte de presse et d’expression qui n’existe pas a Madagascar. Les tenants du pouvoir ont utilise ces mots d’ordre pour acquerir illegalement le pouvoir a Madagascar et en ont fait fi deliberement de cette valeur pour pouvoir garder ce pouvoir mal acquis. En tout cas, la situation actuelle risque d’etre tres explosive et intenable. Rajoelina le sait et en plus, la communaute internationale le tient par le cou avec toutes ces bevues, entetements inutiles, et unilateralisme qui n’aboutira nullement a aucune vraie reconaissance. Rajoelina delire a chaque fois et inteprete le peu de loi encore viable toujours en sa faveur, dans le but de sauver sa revolution orange qui est moribonde depuis sa naissance. Rajoelina delire, ai-je mentionne quand il se met à déclarer que les manifestations ne seront autorisées que lors des propagandes électorales. IL est tellement malade et ignorant qu’il veut a tout prix que tout le monde se soumet a de telle ignomnie et dictature. J’ai honte pour mon pays de voir un tel gars a la tete du pays sans etre elu. Il insiste a une election sans pour autant accepter les accords et conventions intermedaires signes par tous. Il faut le degager de la s’il le faut sinon, notre pays ira a une perte incontrolablement debile.Tout le monde se plaint maintenant et meme ses allies se sont retrouves manipules et mis a l’ecart. S’il ne veut pas une solution a l’amiable ou tout le monde participe sans exception au redressement du pays, il finira la corde au cou bientot sans aucune chance de recours.

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