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Tribune libre

SEFAFI

Pour un retour à la sagesse politique

lundi 22 juin 2009 |  391 visites 

Un pouvoir a été renversé, un autre l’a remplacé. Madagascar est malheureusement coutumier de ce phénomène depuis la fin de la Première République en 1972. En attendant le jugement de l’histoire, qui échappera aux polémiques intéressées du moment, les faits donnent à réfléchir sur leur déroulement et leurs conséquences.

Un changement de pouvoir n’est pas seulement une affaire de légalité. La légalité ou la légitimité peuvent être sujets à débats, comme la constitutionnalité ou l’anti-constitutionnalité de certaines procédures. Ces querelles sont récurrentes, elles éclatent aussi bien à l’occasion d’alternances hors normes que pendant l’exercice normal d’un mandat présidentiel. Là n’est pas le fond du problème.

Un changement de pouvoir, surtout s’il est issu de manifestations populaires, est aussi une affaire de pratiques politiques, qui témoigne du rejet de comportements injustifiables et répétés et d’un problème de crédibilité des institutions politiques. Or les hommes politiques à qui sont imputables la plupart des problèmes du passé sont toujours présents. Aucun d’eux eux n’a reconnu s’être trompé, ni avoir abusé de ses fonctions ou détourné des biens et de l’argent publics à des fins personnelles. Cette absence de remise en cause doit nous interpeller, car le refus de tirer les leçons du passé et l’impunité incitent à récidiver, et provoquent de nouvelles frustrations et de nouveaux mécontentements chez les citoyens qui en sont victimes. D’où la nécessité d’un usage bien réfléchi de l’amnistie.

L’amnistie pose des problèmes moraux, éthiques et surtout de justice. Le crime, malgré l’effacement artificiel de l’amnistie, a fait des victimes qui portent en elles et à jamais des traces indélébiles du geste qui les a atteintes. De même, les crimes économiques comme les détournements de deniers publics, les infractions à la législation douanière et fiscale ou des relations financières avec l’étranger ont causé des préjudices graves pour l’Etat et donc pour l’intérêt général. Si l’amnistie est un acte de pardon, elle ne doit pas se traduire par le culte de l’impunité.

De la violence à la haine

La violence s’explique alors comme une réponse à ces abus. Elle est l’arme des pauvres, de ceux qui se sentent exclus de la croissance et de la promotion sociale. Les pillages et les morts du 26 janvier dernier, sur toute l’étendue du territoire, peuvent être interprétés à cette lumière. La violence est aussi un mode d’expression de ceux qui, soudain, se sentent forts et veulent faire étalage de leur puissance. Ainsi des militaires, chefs et subordonnés, qui, enivrés par leur importance nouvelle, ont brutalisé des civils, maltraité les manifestants et tiré à balles réelles sur les foules désarmées.

La violence est encore le produit d’un système permanent d’exploitation impitoyable : lois scélérates, décisions de justice iniques, salaires misérables et conditions de vie indignes, sans échappatoire possible. A l’autre extrémité de l’échelle sociale, la violence est le fait d’une minorité jusqu’ici assurée de l’impunité par tous les régimes successifs, et qui n’accepte ni d’être dépossédée de ses privilèges ni de perdre les avantages qui en découlent…

Mais lorsque la violence ne débouche sur rien, ou se voit neutralisée par une autre violence, la haine s’installe. Le peuple malgache a certes la réputation d’être pacifique et de ne pas se laisser emporter par la violence et la haine, mais l’histoire récente oblige à nuancer et à réactualiser ce jugement.

Dans la tradition, la haine se manifeste surtout à l’égard de ceux qui se mettent au-dessus des autres alors que leur statut ne les y autorise pas (l’arbre qui s’élève au-dessus des autres est battu par le vent, dit le proverbe). Aujourd’hui, cette haine a envahi le champ politique, animant ceux qui ont le pouvoir comme ceux qui le convoitent, ceux qui l’ont perdu comme ceux qui viennent de le conquérir. Elle se déverse dans les discours des manifestations de rue, inonde les sites Internet par sa mauvaise foi et sa vulgarité, et brise jusqu’aux relations familiales. Le « fihavanana » en est gravement ébranlé. La plus grave conséquence de la crise de 2009 est la déchirure sociale causée par les divergences politiques : divorces au sein des ménages, déchirements entre fratries, inimitiés dans les milieux professionnels, etc.

Cette haine, plus encore que la violence, exprime désormais la volonté des démunis et des exclus, jusqu’ici condamnés à survivre, d’occuper toute leur place dans la société ; dans le même temps, elle exprime le refus des privilégiés de céder la moindre parcelle de leur pouvoir et leur avoir.

N’oublions pas pour autant que de la partie la plus nombreuse et la plus silencieuse de notre société nationale, la paysannerie, est exclue en permanence des débats qui agitent le pays. Depuis des décennies, les paysans sont tenus à l’écart, aussi bien des discutions politiques et des manifestations populaires que des plans de développement et des efforts de modernisation. Ils ont été et restent marginalisés, mais qui donc s’en soucie ? Aurons-nous cette fois-ci le souci de les inviter et de les écouter lors des conférences nationales et régionales.

Retrouver le sens du politique

Le politique est le lieu de l’affrontement des idéologies, des projets de société et des décisions qui en découlent. Il est le théâtre d’un combat d’idées arbitré par les seuls électeurs, et implique un respect des opinions de l’adversaire qui devrait exclure tout sentiment de haine personnelle. Car la confrontation politique porte exclusivement sur la gestion du collectif, l’organisation du bien commun de la nation, la lutte contre la pauvreté et les discriminations, la stratégie d’un développement profitable à tous et pas seulement à une minorité, etc.

S’exprimant par le discours, les hommes politiques deviennent crédibles dans la mesure où ils respectent leur parole et leurs engagements. Ils doivent admettre que le travail d’éducation civique conduit ces dernières années à abouti à une plus grande maturité des citoyens. C’est ainsi que la population a marqué son attachement aux libertés publiques (par exemple la liberté d’expression par divers moyens et l’accès aux médias publics), exige la transparence dans la gestion des biens publics, réclame des élections libres et transparentes, lesquelles devraient conduire à sanctionner les dirigeants coupables de dérives. Et cela à tous les niveaux, dans les collectivités décentralisées comme au sommet de l’Etat

A ce titre, ce qui a été délictueux doit être condamné, par les tribunaux et pas seulement par l’opinion publique. Qu’y a-t-il de plus révoltant que de voir un homme politique dont la carrière a été entachée de mensonges et de reniements, d’abus de pouvoir et de détournements, se présenter indéfiniment devant les électeurs au nom du consensus et de la réconciliation nationale ? Une amnistie ne peut s’exercer que par rapport à une décision de justice, et non à partir de bons sentiments. L’impunité des uns engendre la haine chez les autres.

Le remède à cette situation malsaine est un retour aux principes fondamentaux de la vie politique. Celle-ci n’est pas et ne doit pas rester le prétexte pour quelques-uns de s’enrichir, en confondant la gestion des intérêts généraux de l’Etat avec celle de leurs intérêts personnels. Ce fut le cas depuis des années : que ceux qui en ont été les artisans et les complices, et qui sont connus de tous, aient la décence de se retirer ! Faute de quoi, la loi pourra leur être opposée. Une « transition » doit aussi servir à assainir la classe politique.

Pour passer de la haine au dialogue, la rénovation du politique s’impose. En publiant le recueil 2008 de ses communiqués, le SeFaFi a choisi un titre évocateur : A qui appartient l’Etat ? [1] Son Avant-propos rappelait opportunément que « le politique est le dépositaire de la volonté populaire, il n’en est pas le maître exclusif et définitif ; et l’Etat ne lui appartient pas, il appartient aux citoyens ». Il suffira ici, pour conclure, de rappeler les trois principes essentiels de toute action politique : la défense du bien commun, la transparence dans les décisions et dans les finances, le dialogue entre les acteurs politiques et avec les électeurs. La sagesse malgache et le fihavanana en sortiront renforcés.

Antananarivo le 16 juin

6 commentaires

Vos commentaires

  • 22 juin 2009 à 07:21 | mahefa (#1776)

    Salama daholo tompoko,

    Toy ny lahatsoratra sy antso nataon’ny Fiarahamonimpirenena t@ 16/06/09 teo dia tsara dia tsara ny "resabenareo SEFAFI, saingy ... :

    - malahelo mafy aho milaza aminareo fa nisy hadisoana lehibe avy aminareo nahatonga ny firenena nilatsaka an-kady toa izao. Raha vao nanomboka kelikely ny krizy dia nitongilana tany @ « futurs » mpitondra HAT moramora ianareo. Ianareo izay noeritreretina ho elanelam-panahy « objectif ». Tsy nahatoky ary tsy mahatoky anareo intsony ny ankamaroan’ny olona satria na ny fanambarana nataonareo na ny fihetsikareo tetsy sy teroa dia nandiso fanantenana. Tsy nahagaga raha tsy mahatoky anareo izahay raha ianareo no hatao « modérateurs » na mpandrindra ny fihaonambem-pirenena. Ny mpamatsy vola suisse sy alemana moa dia tsy nahatoky anareo intsony hoe « neutres » nandritra ny krizy ka hatramin’izao noho ny fironanareo. Tsy mahagaga raha miala aminareo izy na dia azo heverina ho anisan’ireo firenena mpanampy anareo indrindra aza izy ireo @ resaka : demokrasia, fanabeazana olom-pirenena vanona ary fahalalahan’ny fanaovan-gazety.

    - Manontany tena izahay hoe : azon’ny olona ve aloha ity « fanaraha-maso ny fiainanm-pirenena ataonareo ity e ». Toa manao fanambarana « théorique » @ gazety fotsiny dia « izay ». Ny loza dia hita be loatra ny « fironana » ka rehefa hitanareo fa tafidi-kizo ny firenena vao hoe : « sagesse politique e, fihavanana e, ... ». Tohizo ihany io fomba fiasanareo io fa « tsy hahazo financement @ mpamatsy vola avy @ firenene démocrates intsony ianareo ». Sa ve tsy maintsy justifié-na ny financement azonareo dia mody manao fanambarana indray ?

    Ny an’ny « fiaraha-monipirenena moa dia izao vao mody miantso hoe « mifanaraha » sy hoe »carton jaune« , nefa teo aloha teo dia manao fihetsika sy fanambarana mirona any @ putschistes. Ao aminareo no misy ireo »imminents juristes« sy manam-pahaizana ikohizana eto @ firenena, nefa ... resin’ny »sentiments« sy »raisonnements subjectifs« teo @ fijerena ny fiainam-pirenena. Je répète : »je n’ai plus confiance en vous, vous qui êtes sensés être objectifs et neutres« . Pour être crédibles, réctifiez d’abord vos tirs ! Ayez ensuite des yeux »objectifs et neutres« pour être dignes d’un »observateur de la vie nationale« , car un vrai observateur doit être impartial ! Enfin, soyez transparents dans la gestion de vos activités : dites à tout le monde, d’où proviennent vos sources de financement ? combien avez-vous reçu pour cela ? êtes-vous satisfaits des résultats obtenus jusqu’ici (comparaison entre ce que vous avez reçu et ce que vous avez réalisé) ? Combien de »resabe an-gazety« avez vous émis et combien de personnes l’ont-lus ou considérés ? Si vous répondez à l’une de ces questions, je commencerai à vous écouter, car c’est ça le début d’une »fanaraha-maso ny fiainam-pirenena« ou »observation de la vie nationale".

    Mahefa

  • 22 juin 2009 à 09:40 | Jeanmi (#838)

    Rien à ajouter. Tout y est.
    Sauf les noms de ceux qui vont pouvoir, une fois acceptés comme négociateurs, nous sortir de cette m....ouise !

  • 22 juin 2009 à 11:13 | maso (#2264)

    Le problème avec le sefafi c’est qu’il est sorti de son rôle d’observateur pour devenir acteur et cela se ressent, son analyse bien que pertinente manque cruellement d’objectivité.
    Sa deuxième faiblesse il l’a toujours eu c’est de faire des analyses ne tenant pas compte du contexte présent et spécifique.
    Bref c’est intello mais ce n’est pas pertinent

  • 22 juin 2009 à 17:17 | Jekely (#2716)

    Miombo-kevitra feno @ Mahery.

    Ireto SeFaFi ireto olona tsy marina. Ts’isy « objectivité » mihitsy ny fihetsiny. Rehefa may i Ambondrona vao hoe«  »Domy a...".
    Raha mbola ianareo sy ny Knoe, de ts’isy fanantenana hahomby mihitsy ny fifandinihana sy ny firesahana. Mbay faty any.

  • 22 juin 2009 à 19:02 | observatrice (#2065)

    rattraper les erreurs est quelque chose de très difficile. quand les gens sensés être des référents objectifs se fourvoient pour des raisons x ou y, retrouver la confiance : c’est une paire de manches .

    Ceci est valable pour les politiciens mais aussi pour vous SEFAFI, qui, au lieu de rester dans votre rôle d’observateurs , avez pris parti dans ces événements.

    La population est à chaque fois à la recherche d’un « homme nouveau ». Tsy lany olomanga i Madagasikara ? jusqu’où ?

    l’éducation politique est de longue haleine, et doit commencer dès le plus jeune âge. La génération actuelle est le résultat de la période néo coloniale ,puis de la période Ratsiraka .

    Alors pourquoi s’étonner ?

  • 23 juin 2009 à 00:24 | ikopa (#671)

    Tsy ho gaga mihitsy aho raha toa ka rahampitso na rahafakampitso ireto mpanohana an’i « DADA » ireto no manompa sy manaratsy ny SADC sy ny SWAZI satria raha vao tsy maneho fironana bontolo any @ ra8 dia hitan-dry zareo ireo fa olon-dratsy sy kentrina daholo.

    Tokony ho tadidin’izy ireo ihany anefa fa efa nanao fanairana ankolaka an-dr8 anie ireo olona rehetra ireo fony mbola niseho iny raharaha SYlvain Urfer iny na ny tany alohan’izany saingy nifiran-dra8 fotsiny izao ireny satria tao dia tao tokoa ireto mpanolo- tsaina « mahay » noho ny mahay eran-tany ireto. Na ny Nonce apostolika dia efa mba « niana-kendry » nampitandrina azy saingy dia araka iny fiteny ato iny hoe : « miteny foana....fa... ehe.... »

    Ka izao ilaozan’ny rariny izao ianareo sy ny dadanareo vao hoe « mitokilana » e.

    Ny mba tianay homarihina @ SEFAFI kosa dia izao :

    Tsindrianay manokana ilay ambaranareo ato hoe : « ...la gestion du COLLECTIF, l’organisation du bien de la NATION, la lutte contre ....les DISCRIMINATIONS, la stratégie d’un développement profitable à TOUS... »

    Ka ny zavatra mampanahy foana dia izao ry zareo. Noho ny antony tsy fantatray dia n’innina ny endrika fitondrana nisy teto hatr@ izay dia toa mahatsiaro fa voailika ho tsy anatin’io lazainareo @ hoe « COLLECTIF » na « la NATION » ary « TOUS » io ny vahoaka malagasy any @ faritany na raha tsorina dia ny « CÔTIERS ». Ka raha vao mer.na ianareo no manao ireo filazana sy fanambarana ireo dia efa manahy sy tsy matoky ireto havanareo fa resaka bobaka natao hanambakana ny vazaha mpamatsy vola indray io fa tsy misy avy am-po.

    Koa hita tokoa fa miezaka ny manao famakafakana ianareo saingy ho zava-maina ihany izany izany satria araka io ambaranareo io dia raha mbola misy foana ny lonilony avy @ ireto havantsika tanindrana ireto dia tsy hisy tany milamina izany eto.Hifanenjikenjika sy hifanonganongana tsy misy farany eto isika.Ka na iza mpitondra managana MAGRO sy DECAGON na zavatra hafa heverina fa hitarika fampandrosoana eto dia ho lasa lavenona lalandava izany.Ka alaim-panahy ny tena hilaza hoe izay manam-bola azo ampiasaina dia manangàna bizna any Swazi toa an-dra8.

    Tsy resaka fandranitana adim-poko izany havako fa resaka tsy mihatsara velantsihy.

    Ny fanafodin’ny aretina politika misy eto amintsika anie dia noentin’ny vazaha niaraka t@ baiboly e.

    TIAVO NY NAMANAO......

    Raha hanao zavatra tsara ianao dia ezaho ange atao @ fo kristiana e. Izany hoe ataovy ho an’ny hafa izay tsy olom-pantatrao ary sokajin’izay tsy afaka mamerina izany aminao. Dia hohitanao tokoa fa na ny fomba fisainana malagasy dia hiova tokoa.

    Ny mahavoa antsika manko dia samy manao izay heveriny fa tombontsoany manokana raha tena iny fa tonga tokoa manoloana ny vata misy ny harena.

    Ka raha haintsika ny manatanteraka io hafatry ny Tompo io, « TIAVO nY NAMANAO... », dia hahay politika tokoa isika gasy.

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