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Tribune libre

Opinion

Unité nationale pour le Rova

jeudi 20 septembre 2007

« Dans les années 60, au lycée Gallieni, je n’ai appris l’histoire de Madagascar qu’en classe de seconde. Il nous était interdit de parler malgache en classe. La majorité des profs étaient français et l’acculturation était voulue. Le programme scolaire malgache était calqué sur le programme français. Comme si un gamin d’Isotry avait les mêmes besoins en formation que- » le petit parisien du XVIe. Situation qui a débouché sur les événements de mai 72. Quand nous écoutions du rock, notre père nous engueulait car il ne voulait pas entendre cette musique de sauvages.

De même, il nous était interdit de lire certains B.D. de voir certains films, car disait-il c’est de l’incitation à la débauche et au gangstérisme. Le cinéma est aujourd’hui considéré comme le 7ème art, et la bande dessinée comme le 8ème. Ce qui était interdit hier, est encouragé aujourd’hui. Ce qui était illégal hier, est aujourd’hui un droit acquis (I’I.V.G. en Europe par exemple). Et la malgachisation rêvée par toute une génération (dont j’en ai fait parti) toujours une gabegie. Evolution inéluctable de la société. que les politiciens conservateurs et les institutions religieuses ne peuvent envisager. Les premiers étant obnubilés par la satisfaction immédiate, et les seconds par une hypothétique vie dans l’au-delà. Le philosophe Gilles Deleuze pensait que la littérature, la philosophie, les arts ne servaient à rien, mais que le monde serait mille fois pire sans.

A quoi sert-il de reconstruire le Rova de Manjakamiadana ? A quoi sert un musée ? A quoi servent la littérature et le vako-drazana ? Pourquoi se doter d’un vrai ministère de la culture et pas un sous secrétariat d’état avec un sous-ministre sans budget ? Charles de Gaulle avec André Malraux et François Mitterrand avec Jack Lang ont bien compris que le rayonnement et la puissance de la France dépendaient aussi de la Culture. Deux grands présidents, deux littéraires. Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac deux présidents énarques, deux technocrates sont déjà dans les oubliettes de l’histoire. De même quand on regarde l’histoire de Madagascar, ce que tant de Malgaches anonymes ou célèbres ont fait pour la fraternisation de ce pays, pour défendre sa culture, pour faire triompher l’intérêt collectif sur les intérêts privés, pour la citoyenneté responsable avant le chacun pour soi, on est tenté de céder au découragement et de se dire qu’au fond on ne retient rien de l’histoire et que tout cela n’a servi à rien. Pourquoi tant de déclarations intempestives de personnalités sur le Rova, qui ont surtout fait preuve de leur sensiblerie et de leur puérilisme, déclarations qui n’ont guère fait avancer la cause du musée du Palais de la Reine ?

Tous les responsables démagogues ont préféré surfer sur l’émotion des Tananariviens suscitée par l’incendie et c’était la surenchère dans les promesses. Il était plus facile de se laisser aller, de hurler avec les loups, d’attiser un mix de haines et de rancoeurs que de se poser en citoyen responsable, en véritable homme politique soucieux de l’avenir et de l’histoire. Etre un citoyen responsable demande un effort. C’est une construction intellectuelle, ce n’est pas instinctif. Etre un homme politique responsable, c’est être moins con que les autres. C’est penser les phénomènes dans leur histoire, réfléchir avant de parler et n’approuver les déclarations et les décisions politiques qui, à terme ne rendent impossible ni le « vivre ensemble », ni la réalisation des projets collectifs. Un projet n’existe et à fortiori ne réussit que s’il y a désir des citoyens. Aux responsables publics de susciter ce désir. A ne pas confondre avec le désir d’une pute, qu’on paie et qu’après on méprise. Une pute répond à un besoin momentané, furtif Une action politique ne doit pas répondre à un besoin furtif. Elle doit s’inscrire dans la durée. Celui qui a besoin d’assouvir ses besoins sexuels immédiatement ne comprendra pas votre théorie sur l’avenir. Et pourtant, il faut le faire, expliquer, convaincre, se remettre en cause, débattre encore et toujours. C’est ce qui nous fait défaut.

A Madagascar, I’impératif de légitimité prime sur l’impératif de performance. L’impératif de légitimité (voir comportement et profil psychologique des politiciens malgaches) suppose de ne heurter personne, de savoir inspirer confiance par ses kabary, écouter « ses clients », exprimer puis éventuellement traduire en actes les aspirations collectives. L’impératif de performance au contraire exige compétence, esprit de décision et capacité de prendre des mesures peu populaires mais nécessaires, ou encore de résister à une évolution de l’opinion peu compatible avec la vision que l’on a de l’avenir. Le courage politique, c’est l’attitude qui consiste à décider à donner la priorité à l’impératif de performance sur l’impératif de légitimité. Notre hyper actif président Marc Ravalomanana a à sa manière ce courage politique, c’est pourquoi il a contre lui une partie de la H.S.P. (haute société protestante) les politiciens clientélistes, et parce qu’il trouble le jeu de pas mal monde qui considère Madagascar comme leur pré carré. A voir les partis d’opposition se figer dans une attitude stérile et calculatrice, miser sur l’échec de Marc Ravalomanana ou sur une éventuelle soulèvement populaire pour arriver au pouvoir, les querelles du parti au pouvoir, et les déclarations entendues pendant cette campagne préélectorale, je me dis que nous sommes encore loin d’être des responsables dans le comportement politique et citoyen. Doit-on être étonné si la reconstruction du Musée du Palais de la Reine est à son degré zéro ? »

Rakotonirina Mamy Romuald
lot VB72DB
Ambatoroka Antananarivo

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